Ça y est, j’ai lu ma première chronique de Richard Martineau. 

Et franchement, si j’avais pu m’en passer je me sentirais bien mieux. 

Malheureusement, ce n’est pas le cas, et quand j’ai lu son article hier, j’ai cru que c’était écrit par un adolescent fâché et revanchard de s’être fait bannir de Facebook. ‘’Ça fait cinq jours que je ne peux aller sur Facebook et je m’en porte très bien’’. Martineau, tel le Renard de La Fontaine, s’est-il convaincu lui-même que ce Facebook devenu inatteignable n’est finalement pas assez bien pour lui ? 

Ou bien, serait-il jaloux que les otaku aient eu moins de difficultés que lui à passer la crise ? Sinon, qu’est-ce qui justifie cette hargne envers la communauté? Comment peut-on se sentir fier d’inciter ouvertement à la discrimination et à l’intimidation dans une société québécoise qui valorise l’inclusion et la diversité ? Et, même si on n’est pas surpris, ni par le personnage, ni parce que les attaques demeurent récurrentes envers les otaku, ça ne veut pas dire qu’il faut laisser passer.  

Ce texte, publié dans le journal de Montréal, tient bien plus de l’insulte de cour d’école que du journalisme d’opinion. Traiter des gens de débiles dans leur sous-sol et d’handicapés sociaux, on ne peut pas dire que c’est de la haute voltige journalistique ! 

Le plus choquant, c’est que le journal de Montréal (j’omettrais la majuscule de politesse) ose publier de pareils propos diffamatoires. Est-ce que la direction éditoriale dormait au gaz ? Je ne m’oppose évidemment pas à la liberté d’expression, mais il y a une différence entre émettre un point de vue provocateur et écrire un texte insultant visant à stigmatiser et discriminer toute une tranche de la population, que l’on ne semble ni connaître ni savoir définir. 

Geek, pas-de-vie, otaku, nerd… Martineau aurait-il pigé ces termes au hasard sur internet pour supporter son point ? Quand on choisit un mot, il faut non seulement le comprendre mais aussi l’utiliser à bon escient. Valérie Harvey pourrait lui donner une leçon.  

Ces ‘’handicapés émotionnels’’ évoqués dans le texte existent en effet. Au Japon, on les appelle des hikikomori: c’est un phénomène pathologique rare, et qui ne représente nullement la communauté otaku dans son ensemble. Et d’ailleurs, définition mise à part, comment se moquer des gens qui ont des problématiques de relations sociales dans un contexte aussi difficile que cette période de confinement, qui plus est pendant la semaine de lutte contre les maladies mentales ? Martineau fait des raccourcis simplistes et manichéens avec les bons, les normaux d’un côté et les ‘autres’, les différents, les débiles, les handicapés mentaux, les otaku de l’autre. 

Et bien je suis ‘les autres’ et j’en suis fière ! 

S’il pense que les otaku ne sortent jamais de chez eux, alors c’est qu’il n’est pas beaucoup sorti ces dernières années lui non plus. A t’il entendu parler des conventions consacrées à la culture pop japonaise qui attirent des dizaines de milliers de personnes, et génèrent des millions de dollars à chaque année ? Les a-t-il observés, ces otaku, en train de socialiser, de rencontrer de nouvelles personnes, de découvrir de nouvelles cultures, d’échanger sur leur passion et sur des techniques pointues utilisées pour réaliser leurs costumes. 

S’il avait pris la peine de leur parler avant de rédiger, peut-être aurait-il pu constater le niveau de connaissances qu’ils ont, leur culture générale, le niveau d’analyse qu’ils développent en étudiant leur sujet à fond ! Il aurait sûrement ressenti l’ambiance d’extrême convivialité, de respect et d’acceptation qui règnent dans la communauté.  

Tous les jours, dans notre Lounge, nous assistons à la naissance d’amitiés en chair et en os, à des débats structurés et argumentés, à l’épanouissement d’artistes inspirés par la culture japonaise. Tous les jours, nous initions des enfants doués ou en difficulté scolaire à l’amour des livres et les voyons se plonger pour une après-midi entière dans un manga, alors que le reste du Québec se désole que ‘’les jeunes ne lisent plus’’. Et malheureusement, tous les jours, nous entendons aussi des otaku fatigués de se justifier et de se battre contre les préjugés véhiculés par des ‘’bully’’ comme Martineau. 

Que ce soit pendant ou après le confinement, les otaku, les geeks, les nerds, resteront ce qu’ils ont toujours été : une source d’inspiration !  

Amélie Jean-Louis, propriétaire de O-Taku Manga Lounge 

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