Véritable auteur à succès et au centre de toutes les attentions, Fujimoto Tatsuki a le vent en poupe auprès des lecteurs de mangas. Jeune mangaka de 27 ans, avec ses histoires à la fois simples et complexes, l’auteur sort clairement du lot. Dans la chronique d’aujourd’hui, on tire le portrait du mangaka Fujimoto Tatsuki avec ses deux dernières œuvres parues en français : Fire punch et Chainsaw man.

Fire punch : une ode au cinéma ?

Cinéphile averti, le mangaka aime le grand écran. Cet amour inconditionnel du 7e art s’épanouit à foison dans Fire Punch. L’auteur ne lésine pas à incorporer des références cinématographiques dans son manga : Akira, Star Wars, Pulp fiction, Die hard, MAD Max 2… tout y passe. À la fois incompris et véritable génie, l’auteur pourrait être reconnu tel le Quentin Tarantino des mangas.

Fujimoto Tatsuki incorpore dans Fire Punch le personnage complexe de Togata. Présentée comme un personnage antipathique, rébarbatif, très énergique, Togata est, comme son auteur, une fan fini de cinéma. Le manga se déroule dans un monde post apocalyptique, où le cinéma n’existe plus. Suscitant beaucoup d’émotions en lui, le cinéma laisse très vite une passion effrénée qui, au fil du temps, viendra à se dissiper. Dès lors en manque de stimuli audio-visuels, elle entend parler d’une torche humaine nommée Agni en quête de vengeance et dévastant tout sur son passage. Voulant se propulser réalisatrice du film et non spectatrice, de la vie d’Agni, Togata fera tout pour réaliser le meilleur film possible.

La passion et la volonté de Togata sont si fortes qu’elle manipule les autres pour les faire agir comme elle l’entend. Ayant une place centrale dans le déroulement de l’histoire, Togata est probablement le personnage le plus important de l’œuvre. Elle manipule ses figurants, qui se présentent sous la forme des personnages du récit, à sa guise afin de donner une trame et une continuité à son film, et ce côté manipulateur sera le fil rouge de la première partie de la série.
Manipulateur, antipathique et égoïste, Togata bénéficiera d’un développement de personnage assez impressionnant, sortant de sa coquille et de ses plus de 300 ans d’existence, on réalisera que son côté hyperactif n’est en fait qu’une façade afin d’échapper à son vrai soi qu’elle trouve dégoûtant et pessimiste. Togata et le lecteur finiront par réaliser qu’elle n’est finalement qu’une actrice de plus dans cette mascarade cinématographique.

L’intégration de ce personnage se transforme donc très vite en procédé narratif. L’auteur arrive avec brio à incorporer des références de pop culture dans son manga sans forcément faire sortir le lecteur de l’œuvre. Ce procédé permettra à Fujimoto d’incorporer des monologues comme dans un film culte. Lors du monologue de Togata, cette dernière se lance dans une tirade afin d’exprimer son ressenti lorsqu’elle tue un homme. Notre cinéphile hyperactif sortira la réplique suivante : « La marche des vertueux est semée d’obstacles qui sont les entreprises égoïstes que fait sans fin surgir l’œuvre du Malin. Béni soit-il l’homme de bonne volonté qui, au nom de la charité, se fait le berger des faibles qu’il guide dans la vallée d’ombre, de la mort et des larmes, car il est le gardien de son frère et la providence des enfants égarés. J’abattrai alors le bras d’une terrible colère, d’une vengeance furieuse et effrayante sur les hordes impies qui pourchassent et réduisent à néant les brebis de Dieu. Et tu connaîtras pourquoi mon nom est l’éternel quand sur toi s’abattra la vengeance du tout-puissant. »

Ca ne vous rappelle rien ? Mais oui ! Il s’agit bien de la tirade prononcée par Jules Winnfield (Samuel L. Jackson) dans Pulp Fiction avant d’exécuter ses victimes.
L’apparition de Togata dans le récit est une approche fort intéressante, puisqu’en utilisant ces références, l’auteur nous offre un dépassement du 4e mur, mais à l’intérieur du récit, tout en donnant l’impression qu’elle s’adresse aux lecteurs. Le film que Togata veut réaliser représente l’oeuvre dans l’œuvre.

Chainsaw man : un shônen pas comme les autres !

Du même auteur, Chainsaw man et Fire punch sont pourtant diamétralement opposés. Chainsaw man est un manga qui surprend. Ambiance, concept, thématique, personnage… tout s’oppose entre les deux œuvres. Ce contre-pied littéraire a l’audace de nous offrir alors une œuvre tout à fait unique et exceptionnelle.

Racontant la vie du jeune Denji, Chainsaw man nous fait plonger dans un monde chaotique, gore et psychédélique à souhait. L’auteur nous propulse dans la vie de Denji qui, lorsqu’il se fait massacrer par un groupe de yakuza zombies contrôlés par un démon, devra pour survivre en devenir un. Sa nature à jamais modifiée, Denji deviendra une créature mi-homme, mi- démon : il deviendra Chainsaw man. Cette mésaventure se révèlera un salut. Ce héros aux allures de anti-héros est différent des héros de shônen habituels. Égoïste à souhait, blasé, sans grandes ambitions, désintéressé par les opportunités que pourraient lui offrir ses nouveaux pouvoir, Denji se présente comme un héros unilatéralement simpliste.

Dans Chainsaw man, il n’est pas question de grande quête pour devenir le seigneur des pirates, Hokage ou encore Empereur mage. N’aspirant qu’aux charmes féminins, à s’assurer d’avoir un toit et de quoi manger, notre héros se réfugie dans l’allégresse, les petits plaisirs de la vie. Il nous offre une certaine légèreté en complète opposition avec le monde rempli de démons et des litres de sang qui composent le monde qui l’entoure.

Ce vent de fraîcheur, qui permet au lecteur de s’identifier à un personnage sans artifice, est une approche innovatrice en soi. Les aventures de Denji nous montrent un récit novateur et affranchi des trames et des codes du shônen. Au final, Chainsaw man représente l’histoire d’un gars qui, bourré de défauts comme de qualités, est simplement le témoin des choix que la vie lui offre.

Fujimoto Tatsuki, jeune mangaka qui bouscule les codes du genre, est un auteur à surveiller de près. Il nous a montré qu’il était capable de faire preuve d’une créativité narrative et d’un imaginaire débordants. C’est encore plus vrai en regardant le dernier one shot écrit de sa main : Look back. L’auteur sait jongler avec les outils que sa profession lui offre et la pop culture que nous adorons tous. Génie encore trop peu estimé, l’auteur se promet une carrière dans le monde du manga fort intéressante à suivre.

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