La langue japonaise est très riche en vocabulaire et en expressions, mais il y a une catégorie à part et assez unique qui se démarque et si toi, lecteur, tu lis des mangas, tu l’as probablement déjà lu ou vu. Les onomatopées sont omni-présentes dans la langue japonaise, autant dans le langage courant que dans les mangas. On en compte plus de 4500 !

Qu’est-ce qu’une onomatopée ?

Avant de commencer à explorer la thématique d’aujourd’hui, prenons quelques instants pour revoir les bases.
L’onomatopée c’est le « processus permettant la création de mots dont le signifiant est étroitement lié à la perception acoustique des sons émis par des êtres animés ou des objets » (WOW, ouf, je l’ai dit !) du moins, c’est ce que notre ami le Petit Larousse aime nous dire. Concrètement, les onomatopées sont donc les mots que nous mettons en place afin de reproduire non seulement des bruits, mais aussi des sensations, des émotions, une atmosphère ou une situation. Bref, elles peuvent dépeindre des images sonores.

Ainsi, le miaulement d’un chat, le chant du coq, l’hululement du hibou, le barrissement d’un éléphant, le bruit d’une porte qui se referme avec violence, le bruit d’une fenêtre qui se casse, le craquement d’un arbre, le bruit du vent, un éternuement… tous peuvent être représentés par une onomatopée. Elles sont autant présentes dans la langue française que dans la langue japonaise, mais la différence est que les Japonais les utilisent aussi oralement !

Des onomatopées à en perdre son latin !

Bien que tout le monde ne soit pas d’accord sur le nombre de catégories d’onomatopée, on peut en distinguer deux majeures : les Giongo et les Gitaigo.

Les Giongo, les onomatopées dites ‘’expressives’’, sont ce qui se rapproche le plus de nos onomatopées à nous. Il s’agit de la représentation écrite des sons, des bruits qui nous entourent. Pour les Japonais, on y retrouvera les sons émis par les êtres vivants, les cris des animaux (nakigoe) et les sons émis par notre corps ou bien encore notre environnement ambiant (giseigo), par exemple.

Ainsi :
– Nyaa Nyaa sera le cri du chat
– Kaa Kaa celui du corbeau
– Kokekokkoo celui du coq
– Uki Uki celui du singe
– Uooon pour le loup
– Gaoo pour le lion
– Shurushuru pour le serpent

Et pour les sons environnants :
– Pachi Pachi seront des applaudissements
– Botsu Botsu la goutte de pluie qui tombe
– Buu Puu pour le bruit d’un pet
– Geppu pour un rot
– Chuu le bruit d’un baiser
– Zaa Zaa pour une pluie torrentielle
– Pen pen le bruit d’une fessée
– Goro Goro pour le tonnerre
– Mera Mera pour le crépitement du feu
– Shiku Shiku sera le son de pleurs.

De leur côté, les Gitaigo sont les onomatopées symbolisant un état physique, émotionnel ou encore une action. Elles sont dites ‘’impressives’’. C’est celles-là même qui sont présentes en masse dans les mangas, un peu moins dans la bande-dessinée franco-belge ou les comics américains.

Dans cette deuxiàme catégorie, on retrouvera donc :
– Iso Iso pour signifier agir avec entrain, joyeusement
– Goro Goro pour la paresse
– Waku Waku pour l’excitation et la jovialité
– Zara Zara pour définir quelque chose de rugueux
– Uto Uto lorqu’on se sent somnolent
– Uka Uka quand on est distrait
– Meso Meso lorsqu’on pleure
– Hahaha lorsque l’on rit (celui-ci est assez universel, haha)
– Giri Giri pour avoir réussi quelque chose de justesse
– Kechi Kechi pour quelqu’un de radin
– Niko Niko pour montrer le sourire
– Fuwa Fuwa pour quelque chose de moelleux
– Tsuru tsuru pour quelque chose de soyeux et lisse
– Pika Pika pour quelque chose qui scintille (tiens, celui-ci semble familier !)

Si ces catégories certes se distinguent, elles restent tout de même perméables en soi. Plusieurs onomatopées seront donc à cheval entre les deux. C’est le cas de Kachi Kachi qui représente le cliquetis métallique ou encore la tension d’une situation d’une personne bornée. Kucha kucha est dans la même situation, elle peut aussi bien représenter le fait de manger bruyamment ou la face d’un visage déformé/ froissé.

Dans la langue japonaise…

Composée de 3 écritures, la langue japonaise, de par ce simple fait, semble déjà assez ardue, mais les onomatopées japonaises en rajoutent une petite couche car la plupart des Giongo seront écrits en katakana quand les Gitaigo sont écrits avec les hiragana ! Attention toutefois, on peut également en écrire avec des Kanji :O

Dans une phrase, les onomatopées sont très vite reconnaissables, les Japonais ont fait simple (cette fois, haha), puisque la majorité d’entre elles consistent à un redoublement de syllabe tel que Doki Doki (qui représente le battement du cœur ou la palpitation amoureuse ressentie devant la personne aimée). Elles peuvent très bien servir d’adverbe, d’adjectif ou encore de verbe. Ainsi si je dis : “ Peko Peko Suru” signifiant que “j’ai l’estomac qui gargouille”, cela pourra également se traduire par “j’ai faim”.

Dans le manga.

Envie d’un petit exemple ?
“Tu flânes sans but (uro uro), tu ne peux t’empêcher de jeter des coups d’oeil à la dérobée (chira chira), la fille dont tu es fou amoureux est à tes côtés, tu as trouvé le courage de l’inviter et vous passez la soirée ensemble. À l’ombre d’un rapprochement, (iji iji), tu es hésitant, elle te sourit (niko niko), tu plonges tes yeux dans les siens : ils sont étincelants (pika pika). Alors que vous vous penchez l’un vers l’autre pour vous embrasser (potsu potsu), des gouttes commencent à tomber. Cela ne vous arrêtera pas pour autant. Une petite pluie fine s’installe (shito shito) .
Plus tu te rapproches, plus tu entends ton cœur battre (chikku chikku). A mesure que la distance entre vous rétrécit, c’est une cacophonie dans ta poitrine, ton cœur bat la chamade (doki doki). Alors que sous la pluie, vos lèvres se touchent (zukyûûûn), tu vis le moment présent, plus rien n’existe. Mais toute bonne chose ayant une fin, vous prenez conscience que vous êtes totalement trempés (bisho bisho), la pluie redouble de force et tourne au déluge (zaa zaa), il est temps de se trouver un abri.”

Omniprésentes dans les mangas, les onomatopées en font partie intégrante. Elles servent à mettre en valeur un ou plusieurs éléments, donner une dimension visuelle supplémentaire au scénario, offrir une profondeur à l’action. Histoire de nous compliquer notre vie, sachez que certains mangaka ont inventé de nouveaux sons, comme c’est le cas pour évoquer le baiser spontané (rien à voir avec le baiser planifié, haha) : zukyûûûn

One Piece et ses fruit du démon.

Eiichiro Oda, auteur du célèbre manga One Piece, aime faire les choses différemment. Il est intéressant de se pencher sur une particularité de l’univers : les fruits du démon. Bien que le manga, comme n’importe quel autre, utilise les onomatopées afin de rythmer son récit, One Piece leur offre une toute nouvelle dimension.

Pour ceux qui ne liraient pas One Piece, les fruits du démon sont des fruits fictifs aux propriétés magiques, un des piliers centraux de l’univers du manga. Maudits par les eaux et les hommes, d’où leur nom, ces fruits démoniaques se répartissent en trois catégories (Paramecia/Zoan/Logia) et dotent leurs possesseurs de pouvoirs hors-du-commun mais les pénalisent aussi, leur ôtant la possibilité de nager par exemple.

Certains de ces fruits du démon sont nommés selon une onomatopée qui en définira les propriétés. Ainsi, plus on est à même de reconnaître les différentes onomatopées présentes dans la langue japonaise, plus on aura tôt fait de deviner quel pouvoir un fruit donnera lorsqu’il sera mangé !
Quelques exemples :
– Le Gomu gomu no mi donnera à son mangeur un corps élastique
– Le Sube sube no mi, un corps glissant
– Le Bara bara no mi, un corps pouvant se fragmenter
– Le Mera mera no mi, un corps de flamme
– Le pika pika no mi, un corps scintillant pouvant se déplacer comme un flash
– Le Baku baku no mi, un métabolisme permettant de tout manger

Il est fascinant de voir à quel point certain mangaka s’investissent dans la création de leur manga. Ce n’est qu’un simple détail mais Eiichiro Oda a su tourner les onomatopées en un outil scénaristique qui compose le cœur de son récit.

Pas de grandes conclusions aujourd’hui, mais sachez que j’ai pris énormément de plaisir à faire les recherches pour écrire la chronique d’aujourd’hui et j’espère que vous en prendrez autant à la lecture. Je vous invite, si votre curiosité vous y amène, à découvrir les onomatopées que j’aurais pu omettre, il y en a tellement ! Cela vous permettra sans nul doute de porter un regard différent aux mangas que vous lisez.

🥭 Chronique D – 20 avril 2021 🥭

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