Passé presque inaperçu et encore trop peu connu à l’heure qu’il est, Hell’s Paradise, ou Jigokuraku dans sa version originale, de l’auteur Yûji Kaku, est le manga qui attend de briller. Premier manga de l’auteur, on ne sait très peu de choses sur ce dernier si ce n’est qu’il a travaillé comme assistant auprès de Fujimoto Tatsuki, le mangaka de Chainsaw Man. Alors que la série arrive bientôt en adaptation animée et que l’auteur s’apprête à déposer sa plume avec le 13e et dernier volume de la série, je t’invite, cher lecteur, à me suivre car je vais te convaincre de pourquoi il te faut absolument lire Hell’s Paradise !
Hell’s paradise, c’est quoi l’histoire ?
C’est dans le Japon du 11e siècle que l’histoire de Gabimaru, surnommé ‘’le vide’’ prendra place. Shinobi-assassin appartenant au célèbre et mystérieux clan Iwagakure, notre protagoniste Gabimaru « le vide » croupit en prison. Trahi par les membres de son clan, Gabimaru attend stoïquement le toucher glacé du bourreau qui lui tranchera le cou et lui permettra de recevoir un dernier baiser, celui de la Faucheuse. Véritable surhumain au corps d’acier et aux techniques ninjutsu meurtrières, aucune exécution ne vient à bout de lui. Gabimaru « le vide » ne ressent rien et la mort ne veut pas de lui. Élevé pour devenir une machine à tuer, il cache cependant en lui un rayon de lumière dans cette vie emplie de violence, de meurtres, et d’obéissance : sa femme.
Lors de son exécution, Sagiri, son éxécutrice, se présente devant lui et lui fait proposition assez surprenante : un certificat de grâce écrit de la main même du Shogun. Il se verrait gracier de tous ses crimes s’il arrivait à ramener un élixir d’immortalité perdu sur une île dont personne n’est jamais revenu vivant. Voyant là une opportunité pour libérer sa femme détenue par son clan, Gabimaru accepte. Cette expédition assez inédite sera également offerte à plusieurs autres criminels qui seront chacun accompagné d’un exécuteur de la famille de bourreaux Yamada Asaemon, dont Sagiri fait partie. Ces duos atypiques feront la rencontre du troisième personnage principal de l’œuvre : l’île paradisiaque dont les secrets sont si bien gardés.
Tout le déroulement de l’histoire se passera en huis clos. L’île, personnage important de l’œuvre, leurs réservant bien des surprises. C’est dès lors en terrain inconnu et engagés dans un « Battle royale », véritable course contre-la-montre et contre les autres criminels, que nos deux héros feront la découverte d’habitants pour le moins inhabituels et horrifiants : l’île est peuplée de papillons au visage d’homme et de créatures chimériques difformes tiré de la mythologie taoïste chinoise, transformant cette île paradisiaque en véritable enfer. L’île et ses nombreux mystères joueront une excellente prison et bloqués sur cette dernière, il leur sera impossible de faire demi-tour. Dès lors, ils n’ont pas le choix : il faut avancer, mais seule la mort semble être au bout du chemin.
Qui sont ces créatures issues des plus horribles enfers ? Quels autres secrets terrifiants cache cette île ? Ou peut bien se trouver l’élixir ? Existe-il seulement ? Nos héros arriveront-ils à sortir vivants de cette aventure ? Telles sont les questions qu’on se pose dès les premières pages.
Le Taoïsme et les arts martiaux comme trame de fond
Élément principal, la thématique du taoïsme abordée dans l’oeuvre dresse une trame de fond incroyable. Hell’s Paradise va principalement s’inspirer de la partie mystique du taoïsme, en opposition à ses volets philosophique et cosmologique, en y ajoutant les codes du shônen tels que le dépassement de soi, le gain en puissance, la persévérance dans l’adversité, etc…
La voie des arts martiaux, dont il va être également question dans le manga (le ninjutsu, l’art du sabre, l’art de la lance, l’art du poing et les voies ninja), sera un moyen pour parvenir à une unité entre ces deux principes. L’œuvre trouvera matière à réflexion et plus on avancera profondément dans l’intrigue, plus l’inspiration en sera grande, notamment avec l’apparition d’un élément scénaristique aussi passionnant qu’inattendu ! Créatures difformes, mystère mythologique et voie de l’unité, Hell’s Paradise pige allègrement dans la thématique. L’auteur, pour un premier manga, met la barre très haut et montre une maîtrise parfaite de son scénario, du développement de ses personnages et une documentation exemplaire sur sa thématique principale,
Un duo complémentaire et attachant.
Je ne pouvais pas ne pas vous parler du duo entre Gabimaru et Sagiri, maîtrisé d’une main de maître. L’auteur offre à ses deux personnages principaux un développement impressionnant. Intimement lié à la relation que Gabimaru et Sagiri développeront l’un avec l’autre, c’est un procédé assez innovant pour un shônen. Ainsi, c’est dans l’adversité et les épreuves qu’ils changeront et trouveront des réponses. Gabimaru, personnage froid, stoïque et sans cœur, trouvera dans sa relation avec Sagiri, une certaine douceur et s’en verra transformé. Petit à petit, il perdra son côté insensible, dû à son entraînement sans pitié, pour se découvrir une certaine humanité qui jusqu’ici lui faisait défaut. A l’opposé, Sagiri trouvera aux côtés de Gabimaru une ouverture d’esprit, une assurance et une affirmation d’elle-même qui lui faisait également défaut au début de l’œuvre.
Cette relation sincère, dynamique et passionnante entre eux deux sera la figure de proue de l’histoire. Il est de bon ton de voir un tel épanouissement de personnages où chacun apporte quelque chose à l’autre. Mais ce n’est pas un développement qui leur sera uniquement réservé, puisque l’auteur vise à nous faire aimer ” les méchants” et détester ” les gentils” ! Tout au long du récit, on en apprendra un peu plus sur le passé, les motivations et l’évolution de chaque duo. Chacun fera fi des idées et des codes imposés apr la société et se rapprocheront pour arriver à la conclusion que peu importe le rang ou le passé, on est tous des êtres humains au chemin différent, ayant fait des choix différents. Il est question ici de montrer qu’il ne faut pas voir les choses toutes blanches ou toutes noires, qu’une personne ne peut être totalement bonne ou totalement mauvaise, qu’il faut savoir poser des nuances.
Hell’s paradise, c’est donc le manga qu’il faut absolument lire en ce moment.
C’est une véritable réussite et il serait dommage de passer à côté de ce petit bijou. L’auteur a réussi un véritable coup de maître en sortant une œuvre totalement maîtrisée du début à la fin. Avec son univers sans censure, violent et gore à souhait, mais qui reste dans les codes habituels du shônen que nous aimons tant, Hell’s Paradise se construit et évolue au gré de ses personnages hauts-en-couleur et est bercé par sa thématique unique.
À la limite entre seinen et le shônen, Hell’s Paradise ose et réussi à nous tenir en haleine page après page, tome après tome.
Découvrez Hell’s paradise dès maintenant !
